Z - DAYS 52 & 53


Cette dernière crise s'est avérée être plus méchante que je ne l'espérais. L'amélioration est venue, mais pas avant aujourd'hui, c'est-à-dire trois jours après le début. C'est bien trop long. Que fait donc le Z ?

Je me suis réveillé hier matin, comme d'habitude ces derniers temps, assez tôt et avec relativement peu de douleur dans le dos, mais un certain niveau d'anxiété comme surgissant de nulle part dès que j'ouvre les yeux. Je me suis levé en pensant, à tort une fois de plus, que le peu de douleur dans le dos était un signe que cela allait aller mieux. Je suis allé chercher le journal au bout de l'allée, comme d'habitude le samedi, et j'ai bien senti, à ce moment-là, qu'il n'y avait pas encore d'amélioration sensible. Le petit-déjeuner a malheureusement confirmé cela. En dépit de la prise du calmant et des paracétamols, la douleur s'est aggravée tout de suite, je suis brutalement retombé dans cet état de profond découragement face à la souffrance, ça me brûlait dans le bas du dos, le ventre gargouillait dans tous les sens, j'avais des frissons. D'habitude, le samedi, c'est moi qui sors chercher l'édition du samedi du journal national et les deux ou trois autres bricoles dont on a besoin pour le week-end. Cette fois-ci, il fallait en plus que j'aille à la pharmacie faire le plein et aussi chez Radio Shack pour acheter du câble de téléphone. Ça allait bien me prendre une heure et demie au total, au moins. Dès qu'on a su que le journal était arrivé au magasin, C. m'a encouragé, presque poussé, à sortir tout de suite, malgré la douleur, malgré la souffrance, pour « me distraire ». Je n'aime pas être traité comme ça, évidemment, parce que cela montre trop clairement que j'ai besoin d'une aide extérieure pour lutter dans ce genre de situation. Mais elle avait raison, en l'occurrence. Je suis parti en voiture, pendant une demi-heure ça a été encore très pénible, je me suis forcé à sourire à la fille qui avait gardé le journal pour moi, je me suis forcé à écouter un sketch comique à la radio et à rire, puis « What Is Hip? » de Tower of Power et quelques autres morceaux de funk, même si je n'étais vraiment pas « d'humeur », et puis je suis arrivé chez Radio Shack, j'ai attendu cinq minutes debout dans le magasin que le vendeur en finisse avec un client, j'avais encore l'impression de tenir à peine debout, et puis il est venu vers moi, on s'est mis à parler, à mesurer le câble, etc. — et soudain la souffrance est descendue d'un cran. Elle n'a pas disparu, bien sûr, mais elle est redevenue « gérable » et mon esprit s'est du coup éclairci, les « mauvaises pensées » se sont faites plus rares.

Le reste des courses s'est passé sans incident et je suis rentré, une heure et demie plus tard, en effet, en pouvant dire que ça allait un peu mieux, ce qui, je l'imagine, a satisfait C.

J'ai travaillé un peu (j'ai de nouveau accepté, évidemment, un « petit » travail de traduction supplémentaire qui va me prendre une bonne partie de la fin de semaine prolongée, avec le jour férié demain — mais on a besoin de l'argent ces temps-ci), le repas de midi n'est pas trop mal passé, la première moitié de l'après-midi a été encore consacrée au travail, et puis, vers trois heures, nouveau voyage précipité aux toilettes et nouvelle montagne de merde puante. Inexplicable. C'est comme si mon intestin avait soudain décidé de changer complètement son mode de fonctionnement. On est passé d'un cycle de trois jours à un cycle de moins de vingt-quatre heures. Je n'ai aucune idée des raisons. La seule nourriture que je pourrais soupçonner, ce sont les figues, que je me suis mis à manger régulièrement dans des biscuits depuis quelques temps. Alors je vais arrêter pendant quelques jours, pour voir. Mais ça me paraît quand même un peu gros.

Vers quatre heures, j'ai commencé à sentir de nouveau le mal de dos revenir en force, vers le bas — et avec lui le découragement. Pas le même que le matin, pas tout à fait, mais quand même assez fort pour gâcher l'essentiel de ce que j'essaye de faire de mon existence. J'avais prévu d'aller à la piscine à 16 h 30 et je me suis mis à hésiter un peu, à cause de ce retour en force du mal — et puis je me suis forcé à y aller quand même, en me disant que, au pire, je pouvais toujours faire la planche pendant une demi-heure.

Le mal sous le bras gauche était toujours là quand j'ai commencé à essayer de nager, aussi fort que lors de la dernière session de natation jeudi qui avait été marquée par l'apparition de la crise. Mais j'ai continué à nager, malgré tout. Plus lentement, plus prudemment que d'habitude, mais en me disant que c'était quand même complètement idiot, qu'une douleur « locale » comme celle-là ne pouvait quand même pas avoir un impact si fort, m'empêcher de nager, etc. Et puis, au fil des longueurs, j'ai commencé à me sentir un peu plus fort. J'ai aussi eu pas mal de reflux gastro-oesophagien pendant que je nageais, mais j'ai essayé de ne pas laisser cela me gêner, me décourager. Et puis je suis sorti, au bout de trente longueurs et de quelques minutes de délassement, et j'ai eu le sentiment de me sentir légèrement mieux — alors que j'aurais pu craindre le contraire. Le reste de la soirée a confirmé cette légère amélioration. J'ai mangé du riz blanc avec des légumes, dans l'espoir de ralentir un peu la digestion (un comble, quand même !). On a regardé des comédies britanniques et ri ensemble.

Réveil similaire ce matin, vers 7 h, toujours avec cette anxiété, malgré la douleur relativement faible. C. s'est réveillée un peu plus tard et a essayé de me réconforter. Et puis on s'est rendormis sans le vouloir vers 7 h 30 et on a été réveillés brutalement par la sonnerie du téléphone à 8 h 45. Je me suis levé, lourd de ce sommeil supplémentaire inattendu, et j'ai couru pour aller décrocher avant que le fax ne prenne le relais. Et la matinée a commencé, avec un niveau d'anxiété curieusement bien moins élevé, comme si le sommeil supplémentaire avait réussi à l'atténuer. Le petit-déjeuner est mieux passé. La crise a semblé avoir décidé de commencer à repartir. J'ai continuer de travailler sur la traduction, en avançant mieux qu'hier, avec l'esprit plus clair. À 15 h, quand j'ai vu que le ciel s'était enfin éclairci, j'ai soudain suggéré à C. d'aller se promener tranquillement au bord de la mer.

Ça faisait de nombreuses semaines que je ne m'étais plus promené, même tranquillement. La natation a remplacé les promenades parce qu'elle semble avoir moins d'impact sur la douleur dans le dos. Cela a fait bizarre de reprendre ce chemin si familier, le long de la mer calme, sous le soleil, sans vent. Au début, j'ai senti beaucoup de faiblesse, d'« hésitation » dans mon dos qui n'est de toute évidence plus habitué. Même en marchant doucement, sans forcer le moins du monde, le simple fait de mettre un pied devant l'autre sur le macadam semblait réveiller des choses peu agréables. On est allés jusqu'à la roulotte avec l'antenne parabolique, la limite que je m'étais fixée au début quand nous avions déménagé ici (1,5 km de la maison environ) et que j'avais repoussée plus loin l'an dernier quand je me sentais en bien meilleure forme. Après avoir fait demi-tour, j'ai ressenti une certaine amélioration, comme si le fait de marcher avec « lubrifié » un peu les choses et permis aux muscles du dos de retrouver leur endurance, leur rythme. En revanche, j'ai commencé à avoir de plus en plus mal dans la hanche droite, à tel point que c'est devenu assez difficile dans les petites côtes. J'avais déjà senti cette douleur un peu hier à la piscine mais je n'y avais pas particulièrement prêté attention. J'ai régulièrement comme ça des douleurs apparemment « arthritiques » qui se réveillent dans les grosses articulations comme les hanches ou les genoux. Elles durent en général une journée et puis elles repartent comme elles étaient venues. Difficile de dire s'il s'agit effectivement d'arthrite ou d'autre chose. Ça fait partie du « mystère », je suppose.

Quoi qu'il en soit, la douleur dans la hanche s'est apaisée une fois qu'on est rentrés à la maison et j'ose espérer, à l'heure qu'il est (18 h), que cette promenade impromptue ne va pas avoir de fâcheuses conséquences dans ce corps qui semble avoir si vite perdu l'habitude de ce type d'exercice. On va bien voir.

J'ai aussi commencé, sous l'impulsion de C., à prendre du sulfate de glucosamine. Il ne semble pas y avoir trop de risques (je ne suis pas diabétique, autant que je sache) et, si ça pouvait avoir de l'effet, ce serait vraiment une découverte. Malheureusement, cela fait partie de ces produits « naturels » dont les effets sont loin d'avoir été prouvés. Dans mon cas, en l'occurrence, je n'ai pas besoin de cartilage pour reconstruire mes articulations (je n'ai pas cette forme d'arthrite, autant que je sache), mais il paraît que le produit peut aussi avoir un effet anti-inflammatoire. Si ça pouvait être le cas, je prendrais, évidemment ! Tout pour éviter ces affreux « NSAID » qui vous percent des trous dans l'estomac et dans les intestins et que je me suis juré de ne plus jamais toucher de ma vie (1995 a suffi), quelle que soit la douleur dont je souffre.

On verra d'ici quelque temps. Ça n'a pas coûté trop cher, alors je n'ai pas trop de scrupules.

Journée fériée demain et, après, c'est le « grand jour », le jour du retour à la « normale », le jour où je dois me prouver que « ça va aller ». Oh, ça va prendre plus d'une journée, mais il faut au moins que la première ne se passe pas trop mal. On va bien voir.

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© 2000 Pierre Igot

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